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Full text of "Lettre du docteur ** au docteur *** au sujet de celle que M. le duc de Chaulnes a fait insérer dans le Mercure du 15 avril 1779"

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L E T T R E 


DU DO CT EU R** 

A Ü DOC T EU R 

Au füjet àe celte que M Je Due de ChaulneSi 
itrfait inférer dans le Mercure du 15 Avril 
1779 ^ 

BÆon cher Kui ; 

Vous favez que, eirconfcric dans les bornes dé 
îa pratique , je ne tiens plus aux Sciences que par les 
liens que vous voulez bien me conferver avec elles : 
les Journaux font les feuls Ouvrages qu’il me foie 
permis de lire j les difcuflîons littéraires qu’on y 
agite, m’àmufent & m’inftruifent, & leur variété 
fait une heureufe diverfion à la marche monotone 
de mes occupations. Oui, mon cher Ami, |’éprouvé 
quelquefois des momens, où, fatigué du fpe<5tre hy* 
deux de la mort, qui paroîtme pourfuivre, je m’em- 
prelTe de fubftituer à ce fpedacle effrayant le tableau 


A 




întéi*êïïant des découvertés dont ori enrichit ïes 
Sciences 5 je crois commercer avec les Sa vans j j© 
leur parle-, les interroge & m’inftruis. Mais , le 
fîlence que quelques-uns d’entr^eux ont voiié aux 
défis répétés & périodiques qu’on leur préfente, 
rompt la chaîne de mes idées, &.jette dü-vuide 
dans l’ordre de mes connoiffancescelui qu’a gardé 
M. Sage a fait fur moi cet effet; toujours attaqué, 
rarement défendu, on ne l’à jamais vu lûi-même, 
ni provoquer, ni répondre. Comme je fais que les 
^rfécutions font toujours l’appanage du génie, .& 
que la modeftie eft le premier fceau du mérite, je 
m’empreffai de me procurer fes ouvrages ; je les lus, 

|e les étudiai, j’approuvai fa tranquillité ; & plu- 
fieurs fois je me fuis dit à moi-même, que^ content 
4’avoir rendu’fes écrits dépofitakes de fes-décou¬ 
vertes , il en a confié le fuccês au tems & â fes en- j 
Bèmis.,Mais la lettre que M, le Duc- de'Chaulnes 
a.fait inférer contre lui dans le Mercure, a fait fur 
moi , je vous 4’avoue j une fi fingulière impreÆon,:, 
que peu s’en ak fallu que je n’en aie âppeilé de mon 
premier jugement ; l’autorité de ce Seigneur fi connue 
«liâmes yeux d’un fi grand poids , que je vous prie 
trèsrinftamment de me donner des éclakçilTemens 
fur les principaux-articles de fa Lettre. Dites-mois, 
je vous en conjure; 

1 °. S’il ell vrai que M. Sage fe foit permis,, à 
titre de Cenfeur, de faire des changemeiis dam 
l’article de -la Grotte du Chien, 



li ) 

'a®. Si les vapeurs de la même Grotte font vüî-* 
“blés, comme le prétend M. Sage., ou invifibles, 
comme M. le Duc l’a avancé. 

3®. Quelles font les raifons qui ont engagé 
M. Sage à exclure le mot airfixe ^ pour lui futfti* 
txxQt ^ax^iàe méphitique, 

. 4®. S’il eft vrai que M. de Sauvages ait. connu 
avant M. le Duc ^ la tranfvafîon de Ÿair fixé. 

5?. Ce que vous penfez de l’alkali volatil que 
M. le Duc a. jugé auflî dangereux que les mouffettes. 

SiPon convient que l’acide méphitique, retiré 
île quelques minéraux, ne foit plus, comme fa pré¬ 
tendu M. Sage,, l’acide marin rendu volatil par la 
matière graffe qui fe dégage des combinaifon^ 
falines. . 

A M. ce 1% 


R È P O N s E 

jy V DOCTEUR ^ ^ 

Jk. Diïü ne plaife, mon cher Ami,- que Je me 
prête à vos defirs : vous voulez.que je décide entre 
M. le Duc de Chaulnes & M. Sage ; mais l’amitié 
qui Vous infpire cette aveugle confiance à mon 
égard , me prefctit à moi de me taire; & l’amour 
àe la vérité qui vous dide cette demande, ne fau- 

Ai) 





toit garantir ma repohfe de témérité. Cependant ^ 
pénétré du refpeét que je dois a ces deux Meflîeurs j 
je me permettrai quelques obfervations fur les qüef- 
tions que vous me , faites ; car fi l’organe de rmi- 
partialité n’eft pas toujours infaillible , il elf aii 
moins excufàble» , - 

1°. M. Sage, avoir été nonamé Cenfeur d’un ou¬ 
vrage intitule : Voyage Pittàréfqüc de IaSuifc & de 
ïés Auteurs dé cet Ouvrage, qui fontefes 
amis,le prièrent d’y faire toutes les corredionVque 
fon aniifé & fès connoifianees croiroient nécèfiai- 
ïes| if.ne trouva que quelques légers changèmenè 
à luire dunsTes trois premières livraifons j mais l’ar¬ 
ticle de la Grotte du Cbien, qui eft dans la qua^ 
trienae ^ iui.en offrit un ,grand nombre : animé du 
même zèle, il fubftitua les vérités aux erreurs ; ii 
crut toujoücS'Tfervir feS' amis y mais il fe tïômpoif^ 
M. le Duc de Chaulnes étoit l’auteur de l’article. 
M. Sage fut cité k l’Académie^ par M.’le Duc, pour 
s’y voir condamner ; mais CO corps illuftre renvoya 
1 aceufateur fans vouloir prendre connoifiance de la 
caufe, & le pria d’en. appeUer à -d’autres tribunaux ; 
ce^fut a celui de M. le Noir.x|u’il fe préfenta.. : ce 
Màgiftrat équitable refufa d’employer à des difcul- 
fions purement littéraires, des momens qu’il a con- 
facré depuis îong-tems à l’humanité. Enfin M. le 
Duc, las de courir vainement de Tribunal en Tri¬ 
bunal , prit le parti dé rendre fa caùfe publique ^ 




(si 

i! la fît ccMîfîgner dans le. Mercure du 15 Avril, k 
fit inférer dans la cinquième livraifon du Voyage 
Pittorefque y & > ne eomptanr peut-être pas encorê 
alTez fiir fa publicité , il la kiteimprimer féparé- 
menr, & diftribuer par M. le Marquis de Con¬ 
dorcet à i allèmblée de rAcadémie du ay d[tt même 
mois^ 

. Vou^ vayez, mon cher Ami, que ce n^eft pas a 
titre de Cenfeur que M. Sage a fait ces çbànge- 
mens tl’ambié qui le lie aux:Auteurs„de TOuvrage , 
le dellr de leur être utik & de ne pas. compro¬ 
mettre leur réputation, .k priere, en un mot» qu’ils 
lui avoient fait de corriger tout ce qui! trouveroic, 
de défeélaeux, voilà les. motifs qui oui eng^e 
M. Sage à fe permettre ces corrections.. 

Il feroit coupable , iàns dou|te»{i» œmm^ îfe dît 
M. le Duc , il avoir mis le nom de M-le Duc au bas 
de la note qu’il y a a|buté ^ naais M. PAbbé de Saini- 
Non, chargé deiimpréf&tfcde rouvrage>.a;difeulpé- 
M. Sage de cette aecufation , en faifantimprimet, 
dans la cinquième Xivraifon., que c’étoit lui qui 
avoir mis le nom de M . le ;Dûc au bas des^uétités. 
dontM.SageavoiteiirichiceîarticIe.- 
- 2® . M.ie Duc, qui convient n avoir Jamais vu^ 
la Grotrie du Chien., dit. que les vapeurs qui en 
émanait font invifîbles^ tous lés Najumliêes dif- 
tingués qui ont été fur. lés üeux, MM. Guettard» 
Fougeroux, Defra^etsilfi Marquisd’Aouft, leDae- 
A'ii| 



JO 

teur Muret, &c, Soutiennent qu’elles font très-vî* 
fîbles. A qui doit-on s’en rapporter ? Sera-ce à ceux 
qui ont vu ? ou à celui qui n’a pas vu ? Je tais même 
le témoignage du Docteur de Mefte, & de plufieurs 
autres,, qui, quoique munis d’uh peu de célébrité 
bien méritée, n’occupent peut-être pas encore une 
place dans les tablettes de ceux à qui nous oppofei 
rions leur Suffrage. 

M. le Pue obferve avec beaucoup de vraisem¬ 
blance J que les vapeurs de la Grotte peuvent être 
mêlées avec quelqu’autre vapeur étrangeté qui les 
rend vifîbles ; mais il s’agit ici de Savoir, fi les va¬ 
peurs , telles qu’elles Sortent de la Grotte du Chien, 
font vifîbles ou invifîblesSqu'importe, pour décider 
laqueftion, qu elles Soient fîmples ou mélangées? 

D’ailleurs vous conviendrez, mon cher. Ami, 
qu’il n’eft pas bien décidé que la vifibilité ne Soit 
un caraélère effehtielà cet acidé méphitique, connu 
vulgairement Sous le nom à'Airfixe ; car en le trans- 
vaSant a un jour doux & modéré , on le voit mani- 
feftement'cGuler comme une légère fumée. Je mo 
fuis convaincu plufîeurs fois de cette vérité,Toit 
que j’aie employé l’acide méphitique de la bierre 
ou du vin en fermentation, Soit que je me Sois Servi 
de celui qu’on prépare dans nos laboratoires.. 

L’on a reproché à M. Sage d’avoir été iner 
xorable aü Sujet du mot air fixe 'j on l’a aceufé d’avoir 
montre trop d’opiniâtreté à le bannir, pour lui SubTr 



Î 7 Î, 

nmtf acide méphitiiiue^. t’autotité de PrieÆ^ 

ley qui IV introduit , eft un titre, a-t-on dit, qui 
:fi)llicke-ion-adoption y mais eft-ce flétrir la mékaoire 
d’uru grand komme, que de- relever fes. erreurs.? 
Sera-Gê lui manquer de refpeét, que de fubftituer à 
des expreflîons vagues & abultves^ des termes pror, 
près & corr-eéts ? 

Dans le tems que Ton croyoit que Voir fixe n’etoâ: 
que de. l’air fixé dans-le corps, la dénomination de 
Frieftley éeoic très-jufle, puifqu-elie étoit d’açcord 
avec ridée qu’on avoir de cette matière ; mais au.r 
jourd’hui qpe tous-les^CEymiftes-conviennent avec 
M. Sage,, que ce qu’il a- défigné fous le mot air fixe 
n’eft plus de. l’air fixé-dans les corps, mais un acide 
particulier difierent de' tous ceux qu’on, connoît j 
pourquoi lui conferver une dénomination fi. abufive? 

Vous- connoiflez , fans-doute, mon cher Ami., 
toutes .les- folides- rations qu’on, a donné |ufqu’ici 
pour- prouver; que l-air! fixe métoit pas de l’air at- 
mofpkéâque altéré y rnais voicLune expérience qui 
a été communiquée par M. de Rome^.qaï prouve 
manifeftement que cet aip fixeiii’en contient :pas ua 
arôme on. ptend un fyphoii, compofé de quatre 
branches, parallèles , dans une des branches du mi- 
Heuil y a une boule d’undiametr© quelconque. Ga 
fait pafiei: de l’alkali dluor; dans cette boule , oa 
plonge une-des,branches,du fyphon-dans le vailïeau. 
qui contient Vacide Tné^hitique -3. &. l’on place 1 © 
Aiv 



Bout recoutbé de l'autre fous la planche de la ma^ 
chine hydropneumatique, fur laquelle on a dif. 
pofé un récipient plein d’eau j tout l’acide méphi¬ 
tique que l’on fait pafler par le tuyau qui plonge 
.(dans le vailTeau oii l’on a mis les matières dont 
on veut L’extraire J fé combine avec l’alkali contenu 
dans la boule, & il ne paffe pas un atome d’afr dans 
de récipient de la machine hydropnéumatique, tan¬ 
dis que, û l’on introduit quelques jbûllés d’àir at- 
.mofphérique dans le tuyau ^ elles palTent à travers 
l’alkali, & vont fe placer à la partie fup^rieüre du 
récipient : cette fimple & fuperbe expérience que 
j’ai vérifié, avec toute efpèee d^ide méphitique, 
prouve bien clairement, que cet ne con¬ 

tient nullement de l’air atmôfphérique ji mais que 
c’efi un acide particulier très-volatil^ qui ne mérite 
pas plus la dénomination'd.éfPrjeftrey., que l’acide 
vitrioliqùe retiré du vitriolr, l’acide nitreux retiré du 
nitre, &g. la dénominationjd’acide méphitique lui 
convient feule, parcêque çeft un acide qu’on trouve 
formé naturellement dans les mouffettes : ainfî l’o¬ 
piniâtreté de M, Sage'à exclure le mot air fixe ^ 
auroit dû être regardée comme le caraé^ère d’une 
grande ame qui fé roîdit contre les abus, & ne 
cherche point, par de lâchas & timides complaifan^ 
ces, à accréditer des préjugés. 

ün.Chymifte moderne , M. Bucouét , en'conve¬ 
nant de l’écidité de l’air^xc j lui a cependant fubf* 



Ys) ,. 

Itîtué nne dénominarionlion moins impropre, cellô 
d'acide crayeux car, puifque la craye eft alkalîne, 
dire acide crayeux j ou acide alkalin, c’eft une même 
chofe : or cçla implique contradidtion. 

4®. M. le Duc de Chaulnes avoir ciré, comme 
de luil’expérience de la tranfvafion de l’air fixe, 
M. Sage l’a fait remonter â M. de Sauvages : les 
feuls écrits de M. de Sauvages peuvent décider d 
qui de deux elle appartient : voici ce qu’ils difent 
{parag. 15 5 de la Dilfertation fur l’aftion de l’air 
fur le corps humain). « Si on prend de cette va- 
9> peur dans une bouteille à ^arge goulot -, elle s’é- 
» vapore aifément j mais en bouchant la bouteille ^ 
« on la cohférve tant qu’on veut. On la verfe d’une 
i> bouteille dans un autre «. 11 connoitibit donc 
la tranfvafion de l’air fixe. 

Mais a-t-il l’antériorité fur M. le Duc ? C’eft la 
fécondé queftion à examiner. M. le Duc dit, que la 
DilFertation de M. de Sauvages, imprimée à Lau- 
fanne, n’a été connue que deux ans après fon mé¬ 
moire ; mais ilparoît queM. le Duc n’avoit pas con- 
noiffance de l’édition i«-4®. qui en a été faite à 
Bordeaux en 1754 , chez la Veuve de Pierre Brun ; 
rue S. James j car , comme il fait certainement 
que fon Mémoire, qui n’eft pas encore imprimé ÿ 
n’a été lu qu’en 1777', il n’auroit pu fe refufer 
d’accorder à M. de Sauvages une antériorité mani- 
fefte de viligt-trois années. 11 eft vrai que cetré 
DiCertation a été riimprjmée à Lanfaime en 1770 



I lo )' 

fnaîs, en partant même de cette édition, M. deSaii* 
vages a une antériorité de fept années. 

M. le Bue dit que l’air fixe^ connu poftérieure- 
ment par M. Prieftley, ne l’éroit pas du tems de 
Al. de Sauvages. Il eft bien vrai que le mot air fixe 
n etoit pas connu j mais le fluide qu’on a déflgné par 
ce mot, rétoit parfaitement : car M. de Sauvages, 
dans le paragraphe 158 , parle des mouffettes de la 
Grotte du Chien, qu’il compare à celle de Perauls, 
de celles qui font près de Touloufe, au fond des 
caves, dans les endroits fermés,.&c. Il dit avoir 
fait des expériences fur ces vapeurs j avoir vu que 
les lumières s’y éteignent,; que les animaux y pé- 
riffent, qu’on peut les puifer, les tranfvafer ; & il 
ajoute qu’il s’eft même convaincu d’un peu d’aci¬ 
dité , par quelque expérience chymique, &c. n’eft- 
ce pas là de l’air fixe ? 

De ce que M. de Sauvages a dit, que ces vapeurs 
confervent long-tems, & même tant qu’on veut, 
leur propriété, je ne cônclurai pas avec M. le Duc 
qu’elles ne font pas de l’air fixe: j’en remplis, dans le 
mois de Septembre dernier, deux grandes bouteilles, 
que je bouchai bien exaéfement j je ne les ai ouver¬ 
tes que le ai du mois de Mai,, pour voir fil’aiç 
fixe avoir encore fes propriétés. Je l’ai trouvé dans 
toute fa force , & me fuis convaincu , contre M. le 
Duc, que cet acide cqnfervoit fes propriétés au- 
delà de fix mois. Au refte, c’eft à tort que M. |e 
Duc aflîgne le terme de fix'mois : car M. de Sauva? 



î TI 1 

.gés ne le détermine nulle part. M. le Duc ajoute 
encore,"que M. de Sauvages s etoit fervi des va-, 
peurs des caves des morts pour faire fes expérien¬ 
ces fur la tranfvafion de l’air fixe dans le paragra¬ 
phe 15 9 ; mais il y a apparence que M. le Duc n’a 
pas lu le paragraphe i(jq , où il dit qu’il vient de 
parler dans le 159, des vapeurs de la mouffette de 
Perauls j ni le paragraphe 15 8, où il donne le moyen 
de recueillir la vapeur méphitique dont il fe fert 
pour les expériences-de la rranfvafion. 

5°. On eft furpris que M. Sage ait ufé du privi¬ 
lège que lui avoient donné les Auteurs de l’Ou¬ 
vrage, lorfqu’il a vu qu’on jugeoit l’alkali volatil 
comme auffi dangereux que les mouffettes; mais 
vous conviendrez, mon cher Ami, qu’il auroit été 
fingulier que M. Sage eût abjuré, dans ce moment, 
une découverte qui flatte à la fois fon cœur & fon 
efprit ; & quand même il auroit été affez grand pour 
facrifier fa gloire fur cet article, lej)ien de l’hu¬ 
manité qui s’y trouve lié, lui permettoit-il de faire 
ce facrifice? 

Mais, mon cher Ami, que trouve-t-on de fur- 
prenant que l’alkali foie un remède affuré contre 
les fuffocations, lorfqu’une fois on convient avec 
M. Sage que ces vapeurs méphitiques font acides ? 
Pourquoi s’opiniâtrer à foutenir que l’acide eft le 
remède de l’acide ? Ce fentiment, défapprouvé par 
l’expérience, n’eft-il pas un paradoxe pour le bon 
fens ? 11 eft de fait que les feuls alkalis ont la pro' 



( lO 

priété de lieutralifer l’acide méphitique, & que îeS 
•acides augmentant fa qualité vénéneufe , toutes les 
expériences chymiques s’accordent U-delTus. S’il eft 
donc vrai que l’acide méphitique paflfe dans le pou¬ 
mon , comme MM. le Marquis d’Aouft, de Lifle j 
Sage, de Mefte , &c. s’en font convaincus par la 
faveur acide qu’ils leur ont trouvé dans les animaux 
fuffoqués, il paroît que le féal moyen de les rap- 
peller à la vie, eft de faturer cet acide qui fufpend 
le mouvement du poumon, & l’alkali jouit feul de 
ce privilège. 

- Je fais que l’alkali a eu des contradiéleurs mais 
le Public toujours équitable, lorfqu’il s’agit de fon 
intérêt, a fu apprécier fes détradeursj & leurs, 
ouvrages font à peine connus, lorfque celai de 
M. Sage , déjà traduit dans toutes les languescir¬ 
cule dans l’Europe entière-, & que des Souverains 
amis de l’humanité, s’emprelTent de le faire diftti- 
buer à leurs peuples. (Le Roi d’Efpagne vient d’en 
faire diftribuer 3 0000 exemplaires ). 

Comme la Chymie s’étoit rangée du parti de 
M. Sage j & que des expériences faciles à répéter 
étayoiênr fbn fyftêmeon a enlevé à cette fcience 
une partie qui paroilToit de Ibn reftort, pour en ap- 
péller aux loix de l’économie animale. On a re- 
nouveîlé des vérités furannées, & l’on a répété en“ 
cote ûno fois V que les poumons n’étoient ni des cor¬ 
nues ni dés ballons : à Dieu ne plaife que -je cpn- 
tefte une vérité trop fouvent méconnue ; mais au 



X -î T 

moins me fera-t-il permis d obfeirver qùe, fi cettç 
loi de l’économie animale ne favorife pas l’ufage 
des alkalis.,. elle n approuve pas davantage celui 
des acides. Mais je prierai ces MM. les partifans 
de l’économie animale, d’obferver que., dans les 
fuffocations dont il eft queftion, il n’exifte ni fenti- 
ment, ni mouvement j le poumon, dans une inertie 
parfaite, efi ouvert aux vapeurs méphitiques qui ^ 
comme plus pefantes que l’air , doivent*fe précipi¬ 
ter dans fon intérieur , & le faturer :de leur qua!r 
lité vénéneufe. L’on doit donc confîdérer le pou¬ 
mon comme un organe paflif qui, n’étant anime 
d’aucune fenfîbilité effedive, eft fournis à des Ibix 
purement méchaniques , &: l’alkali très - volatil, 
très-pénétrant, doit porter fon adion fur ce vifcèré^ 
neütràlifer l’acMe méphitique, & lui faire repren¬ 
dre la chaîne interrompue de fes mouvémehs. 

Je ne nierai cependant pas qu’on ne- fqit' pari- 
venu j par les acides, à rappeller à la- viè des ani?- 
maux fuffoqués 5 mais je foutiens que, dans ces cas^ 
4’acide méphitique n’a voit que foiblement impré¬ 
gné le poumon, & pour-ibis', un irritant quelconr 
que, foit acide, foit alkali i pouvoir lui redonner 
fon mouvement; mais, dans les perfonnes long- 
tems expofés à la vapeur des mouffettes, du char¬ 
bon , &c. le poumon fe trouve fortement affedé de 
l’acide , & il faut néceffairement recourir â i’àlkali 

pour le neutralifer.. 

Vous devez être furpris, mon cher Ami, 



( ‘■4 ) 

que M. le Duc (dont vous connoiflTez d’ailleurs h 
modeftie), fe flatte d’avoir été proclamé vainqueur 
dans une affaire qui n’eft: pas encore terminée y le 
fufFrage de deux ou trois Chymifles, rangés fous les 
étendards de M. le Duc, fuffit-il jamais pour luiafTu. 
rer une viétoire complette ? Ne pourrions nous pas 
leur oppofer l’autorité de Spielmann & de plufieurs 
autres qui, n’ayant apporté aucun efprit de parti dans 
une recherche de cette nature, ont vérifié, par des 
expériences multipliées, les réfultats dé M.Sage. 

Mais vous ferez bien plus étonnélorfque.vôus. 
connoîtrez la marche qu’a tenu M. le Duc lui- 
même. 

Dans le tems que M. Sage marquoit chaque pas 
4dans la carrière chymique par de nouvelles décou- 
•vertes, les yeux de tous lés Chymïftes étoient fixés 
fur lui, & Gontemploient avec étonnement,fa marr. 
-che rapide 5 moi-même j, dans l’anthpufiafrne î je 
m’efforçai de le fuivre, je m’aidai de fes lumières 
& de fes confeils 5 je lui fis quelques obfervations 
fur les : nouveaux minéralifateurs , dont il venoit 
-d’illuftrer la Ghymie j-je lui demandai des éclair- 
•.ciffemens fûr l’acide marin volatil qu’il décoroit 
d’un fir beau.rôle; & je fus affez heureux que, de 
me :prbcurer:une Lettré que M. le Duc de Chaul- 
nes avoir., écrit à. M. Sage, & dont M. Peliflier, 
-Médècin de Montpellier , qui me la communiqua, 
avoit pris une copie fidelle littérale dans le temS' 



La voici telle quelle a été écrite c'je me gardetaî 
bien d’y ajouter ni d’y retrancher j elle perdroit cèr- 
raihément de fori prix. 

<*Sdus 3 honor & argentûm ^atquc bôrium appciitum, 

- « Les complimens que fe font les Doâeurs, ref- 
Si femblerit, sdit-oh, à { qfinus xijînum fricot ) ; c’eft 
ïï affez fouvent. virai j mais cela ne le fera pas icî- 
»s En vérité, jé baiferois prefque le bas de votre 
Si habit de refpeâ:, & vous allez baifèr le bas du- 
w mien dé reconnoiflànee. 

- 3> Je fuis revenu éhez moi en ruminant ce mixte 
» falin volatil, que fournifTent les efTérvefcehces: 
s» de tous les acides avec les alkalis, les terres cal- 
si eâires, &c qui eft identique , & qui. donne avec 
»> lex alkdis végétaux du fel fébrifuge. Je ruminai 
3» de même cette prédidion que je trouverai un fel 
■33. fébrifuge dans mon fel ; mais tout en ruminant ÿ 
« j,e regardoismomfelï &: la première chofe que 

j’ai faite., a été de le tourmentéEj j’en ai trois on- 
„.ces moins deux• gros.de .tout fec; mais pour le 
M faire fekher^ j’ai eu bien du- mal, îl ti’a jamais 
' 3i voulu feicherj premier caradèré qui m’a rappelle 
P mon fel fébrifuge^ -Etant venu à bout de le fei- 
*; cher, en mettant quelques çharbons fous un ta- 
î» mis, la première chofe que j’ai fait, a été d’en 
î> mettre une pincée fur un chaî:bon allumé, il a dé« 



h crépité ; fécond câradère. J’ai mis un peu de dif. 
•9 folution d’argent dans l’eau diftillée, & pris un 
j> brimborion de fel lune cornée précipitée, non 
» blanche, mais jaunâtre ; troifième caraâièré; mais 
» je n’entendois ^as pourquoi jaunâtre, & je corn¬ 
ai mençais à prêndre de l’humeur, de trouver des 
« circonftances qui s’éloignent de ce que je devois 
SS trouverIdiifque, pendant qu’on jpréparoît qu«l- 
ss que chofedans.le laboratoire, je me fuis rappelle 
si le chapitre du- mixte falin volatil , jSc me fuis mis 
» à le lire vr ne voilà-t-iL que j’ai trouvé, pag. 148* 
»? toute l’hilîbire'du précipité Jaune-, de l’acide 
s? marin uni à la matière; gralTe qui Je donne, 6c 
9» qiii le Ébrmê lui-même par i’effervefcençe de l’a- 
si cide vitrioliqae.avec un alkali. “ , \ 

. as Jemefuis.écrié’: AllahKehin Mahammetrefoul 
irailahy. Dieu eft grand , Mahomet eft han Pro* 
^.phete, & Sageha^ .v raillerie â part, c’éft. chofe 
» fuperbe de faire; des profélj^tes de loin, dans üna 
»? matière auffi neuve, par lafîmple force de la vérité* 
»a D’après tout cela, j’èftünernotre air fixe, : Un 
»9 acide marin imi à" une matière grafîè qui fe forme 

Si .pendant k fermentation de k' bierfe ... . * 

Adieu, Allah ^cbitu t: 

Que leS' tans font changés ! M. le Duc plein, de 
y^Jpecl , ne hcafé plus h bai de Vhahit de M. Sage 
& M. Sage doit êtredifpenfé de baifer.celui deM. h 
Ducde nconnoijfance: ’ - , . . . u 

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